Illustré par Lisa Evéquoz
En ce début d’année 2025, le magazine Forbes sort un nouveau numéro accompagné de son habituelle liste des personnes les plus riches de la planète. En tête, des noms bien connus : Elon Musk (342 milliards), Mark Zuckerberg (216 milliards) ou encore Jeff Bezos (215 milliards). La fortune totale des dix personnes les plus riches, selon cette liste, s’élève à un impressionnant total de 1’821 milliards de dollars. À titre de comparaison, un rapport de l’ONU datant de 1999 (Commission des Droits de l’Homme, 08.04.1999) estimait qu’il faudrait « seulement » 80 milliards de dollars par an pour éradiquer la pauvreté mondiale. Un chiffre révisé depuis, oscillant entre 70 et 325 milliards par an, selon les critères retenus. Si 80 milliards ne suffisent peut-être pas à éradiquer toute forme de pauvreté, ils pourraient en tout cas mettre fin à la pauvreté extrême. Celle-ci touche aujourd’hui environ 700 millions de personnes qui vivent avec moins de 2,15 dollars par jour (DDC 19.05.2023) . Pour atteindre cet objectif, il suffirait que les dix milliardaires les plus riches du monde consacrent une partie de leur fortune sur les vingt-deux prochaines années.
L’éradication de la pauvreté fait partie de l’un des dix-sept Objectifs de Développement Durable (ODD) établis par l’ONU (Pacte Mondial et PNUD, consulté en juin 2025) . Seize autres objectifs sont considérés comme essentiels pour bâtir un avenir durable, comme la sauvegarde des océans et de la vie terrestre, l’égalité sociale ou encore la paix et la justice. Ces objectifs nécessitent du temps, des investissements humanitaires comme budgétaires. Et là, nous sommes en droit de nous demander : que font les milliardaires pour aider à l’aboutissement de ces objectifs. Comment ces quelques milliardaires capables de changer la vie de milliers de personnes dans le besoin, soutiennent-ils ces buts ? Et, surtout, ont-ils le devoir moral de le faire ?
Longtemps, la richesse s’est accompagnée d’un certain sens de la responsabilité sociale, souvent guidé par des valeurs religieuses ou humanistes. Donner aux plus démunis était alors perçu, par certains, comme un devoir moral. Mais si l’intention semblait noble, elle a parfois servi de prétexte à des abus majeurs comme la colonisation, justifiée au nom d’une aide au développement. C’est là un autre débat. Aujourd’hui, le rapport à la fortune a changé. La méritocratie dominante valorise le mérite et les efforts individuels, sans toujours tenir compte des prédispositions sociales et biographiques, pour justifier les écarts de richesse. La solidarité, quant à elle, est reléguée au rang de choix personnel, aider les autres n’est plus vu comme un geste normal, mais comme un acte exceptionnel, digne d’éloges. Pourtant, il devient de plus en plus difficile de séparer la réussite individuelle des ultra-riches de leur responsabilité collective, dans un monde où tant de ressources sont concentrées entre les mains de si peu. Quelle est donc la portée concrète des actions menées par les milliardaires face aux enjeux globaux ?. C’est ce que nous allons voir au fil de ces pages.
Elon Musk, des dires qui ne collent pas aux actes
Depuis quelque temps, le multi-milliardaire Elon Musk défraye la chronique pour de nombreuses raisons, allant de son soutien financier au président des États-Unis à ses messages controversés sur X. Il a également provoqué un buzz négatif, lorsqu’il a posté des commentaires transphobes à la suite de la transition de sa fille Vivianne. Mais, au-delà de ses frasques médiatiques et des questions sociales et d’égalité, le milliardaire est aussi une figure controversée sur le plan environnemental. Si vous tapez Elon Musk et écologie sur Google, le premier article qui paraît a pour titre « Elon Musk est officiellement un ennemi pour la lutte climatique » (BonPote, 26. 06. 2023). Et malgré ses affirmations sur la nécessité d’accélérer la transition écologique vers l’utilisation d’énergies durables (Bonpote, 05.05.2025), qui, par ailleurs, bénéficie bien à la vente de ses Teslas, il est bien loin d’apparaître comme un fervent défenseur écologique. Ses entreprises et sa volonté de coloniser mars d’ici 2030 (Futura, 02.06.2025) illustrent bien l’expression « faites ce que je dis, pas ce que je fais ».
Et bien que Elon Musk ait largement contribué à populariser la voiture électrique avec Tesla, ces véhicules sont loin d’être totalement écologiques. Leur usage est plus propre en Europe, où l’électricité est moins carbonée, mais reste problématique dans des pays comme les États-Unis ou la Chine, encore très dépendants des énergies fossiles. Plus encore, la production de ses véhicules est très polluante : extraction de métaux rares, usines alimentées par des énergies non renouvelables, batteries non recyclables et pneus générateurs de microplastiques. Remplacer l’ensemble du parc automobile thermique par de l’électrique ne constitue donc pas une solution durable en soi, comme beaucoup pourraient le prétendre.
Ainsi, si Elon Musk se présente volontiers comme un acteur de la transition écologique, une posture qu’il s’attribue lui-même, ses choix industriels et prises de position publiques dessinent un engagement en demi-teinte, davantage axé sur la performance technologique et la croissance économique que sur une véritable transformation durable et équitable du monde.
Entre l’égalité et l’écologie, Meta fait son choix
Peut-être plus discret qu’Elon Musk, Mark Zuckerberg, le deuxième homme le plus riche du monde affiche pourtant une posture engagée. En 2021, il annonçait la neutralité carbone de Facebook. Sur le plan environnemental, les résultats ne sont pas négligeables : en 2020, Meta atteignait un taux impressionnant de 86 % d’approvisionnement en énergie renouvelable pour ses data centers, et vise depuis une couverture complète de sa consommation électrique avec des énergies vertes (DGB group, 03.07.2024).
Mais cet engagement a ses limites. Selon plusieurs analyses, dont celle du site Greenly (14.01.2025), 99 % des émissions carbone de Meta proviennent du scope 3, c’est-à-dire des chaînes d’approvisionnement et des usages indirects, comme la consommation énergétique des appareils des utilisateurs ou l’impact environnemental de la publicité ciblée et du streaming vidéo. En d’autres termes, si les serveurs de Meta sont alimentés par de l’énergie verte, l’usage même de ses services reste très coûteux écologiquement. À cela s’ajoute le renouvellement fréquent des appareils, encouragé par l’écosystème numérique, qui accentue encore l’empreinte carbone globale. En somme, Meta ne traite directement que 86 % du 1 % de ses émissions totales, laissant la majeure partie de son impact environnemental hors de son contrôle direct.
Et l’ambiguïté ne s’arrête pas là. En janvier 2025, Zuckerberg annonce un tournant controversé : Meta va réduire la modération des contenus sur ses plateformes, au nom d’une « liberté d’expression plus large ». À première vue, garantir cette liberté n’est pas une mauvaise chose. Mais encore faut-il s’interroger sur ce qu’elle recouvre Mark Zuckerberg estime, par exemple, que les entreprises devraient « revaloriser la masculinité ». Il affirme également que les politiques de diversité et d’inclusion ont « encastré » le monde professionnel (le Nouvel OBS, 07.02.2025; Libération, 08.01.2025) . Une vision de la liberté d’expression qui interroge, tant elle semble servir une idéologie plutôt qu’un débat pluraliste. Dans ce contexte, il devient évident que cette décision n’est pas sans conséquences, notamment pour les minorités présentes sur les plateformes. Cesser la modération des contenus haineux permettra aux insultes en ligne de refaire surface de manière beaucoup plus conséquente qu’actuellement, et cela, sans être censurées. Les principales victimes de ces insultes sont la communauté LGBT+, les femmes et les minorités de manière générale. Un grand pas pour l’homme, et un bien petit pas pour l’égalité…
Malgré des engagements affichés en faveur de l’environnement et de la philanthropie, Mark Zuckerberg peine à montrer que ses actions répondent véritablement aux enjeux sociaux et écologiques actuels. Ses efforts écologiques restent insuffisants face à l’impact global de son entreprise, et sa vision de la liberté d’expression soulève des doutes quant à son engagement pour une équité réelle. Ces contradictions invitent à s’interroger sur la direction future de ses prises de position et sur la manière dont elles influenceront la responsabilité sociale des géants du numérique.
Une image séduisante, mais des critiques bien réelles
Un troisième milliardaire mérite qu’on s’y attarde, il s’agit de Bill Gates. Homme le plus riche de la planète de 1992 à 2007, il n’est actuellement « plus que » treizième. Et pourtant, au premier abord, on pourrait considérer qu’il en a fait plus pour notre monde que les deux plus riches. En 2019, il promettait que Microsoft réduirait ses émissions de CO₂ de 30 % d’ici 2030. Il s’engageait également à s’alimenter uniquement en énergies renouvelables et il annonçait que l’entreprise compenserait son empreinte carbone historique d’ici 2050. Par ailleurs, il promettait aussi de verser 200 milliards à sa fondation d’ici 2045, soit la quasi-entièreté de sa fortune actuelle et à venir, pour lutter contre la pauvreté, les inégalités et les maladies.
Un geste ambitieux, parfaitement aligné sur les ODD… en surface. Derrière cette image d’engagement exemplaire, des critiques pointent du doigt une charité orientée vers les intérêts occidentaux plutôt que ceux des populations dans le besoin. La Fondation Gates concentre une part importante de ses ressources pour la vaccination contre la polio (International Organization for Migration, consulté en juin 2025) , chez les moins de cinq ans, dans des pays à risque comme le Pakistan ou l’Afghanistan. En 2024, 411 enfants ont contracté la maladie, qui est mortelle dans 5 à 10 % des cas par paralysie (UNICEF, 24.10.2024). Tandis que quelque 1’200 enfants de moins de cinq ans meurent chaque jour de maladies liées à l’eau insalubre et un manque d’hygiène (UNICEF pour chaque enfant, février 2021) , relativisant l’urgence sanitaire que représente la polio. Alors pourquoi choisir de soigner la polio plutôt que les maladies liées à l’eau ? Selon certaines critiques, la distribution de vaccins profite d’abord aux entreprises européennes partenaires de la fondation, un modèle lucratif renouvelé chaque année. Alors que des investissements dans l’eau potable ou l’assainissement, bien que moins rentables, seraient probablement plus efficaces à long terme.
La même logique s’observe dans ses projets agricoles qui ont pour but de lutter contre la famine. Bill Gates est l’un des principaux financeurs d’initiatives comme l’Alliance pour une Révolution Verte en Afrique (AGRA), qui promeut l’utilisation d’OGM, de pesticides et d’engrais chimiques. Bien que présentée comme une solution à la faim, cette stratégie est accusée de créer une dépendance des petits agriculteurs africains vis-à-vis de multinationales agroalimentaires (Afrique XXI, 07. 12. 2022). Pire, selon certaines études, les rendements n’ont pas doublé comme promis, et la malnutrition aurait augmenté de 30 % dans les pays ciblés par ces programmes (Tchak, 21.10 2020).
Les intentions affichées sont louables, mais les raisons et les résultats interrogent. Pourtant, Bill Gates s’est récemment opposé à Elon Musk en critiquant sa décision de couper le budget de l’aide américaine à l’international. Selon Gates, les ressources de l’aide à l’international sont de plus en plus en baisse, et le nombre de décès ne cesse d’augmenter à travers le monde. L’image que Bill Gates donne de la situation semble tout droit sortie d’un film : Musk, l’homme le plus riche du monde, tue les enfants les plus défavorisés de la planète (Le Journal du Québec, 09.05.2025) . Il ajoute, dans le cadre de l’annonce du don de sa fortune : « Les gens diront beaucoup de choses sur moi quand je mourrai, mais je suis déterminé à ce que : il est mort riche ne soit pas l’une d’entre elles. Je ne veux pas mourir riche » et explique qu’il existe encore bien trop de problèmes sur cette planète pour qu’il conserve cet argent pour lui-même (Sud Ouest, 09.05.2025). Pourtant, derrière ces déclarations fortes, certains doutent de la portée réelle de ses critiques envers Elon Musk. Car, aussi sûr de lui soit-il, critiquer sans passer à l’action ne fait pas avancer la cause.
Cette ambivalence est aussi visible chez son ex-épouse, Melinda Gates. Considérée comme une fervente militante pour le droit des femmes, elle s’est toujours investie pour cette lutte, aussi bien personnellement que financièrement, allant jusqu’à écrire un livre « The Moment of Lift : How Empowering Women Changes the World ». Elle participe aussi activement au soutien de la Fondation Gates, qui est devenue la fondation Bill & Melinda Gates (National Women’s History Museum,2019) . Cette dernière est la fondation caritative la plus puissante au monde (Le Monde, 22.06.2015), et se concentre sur cinq domaines principaux : la Division Santé mondiale, la Division Développement mondial, la Division Croissance et opportunités mondiales, la Division États-Unis et la Division Politique mondiale et plaidoyer. Elle va également fonder sa propre association, Pivotal Ventures, à laquelle elle versera un milliard de dollars (Paris Match, 09.10.2014). L’objectif est d’aider les femmes et les familles à travers le monde, notamment en facilitant l’accès à la contraception et aux soins de santé mentale pour les jeunes et les minorités.
Dans l’ensemble, Bill et Melinda Gates se présentent comme des figures majeures de la philanthropie mondiale, l’un en se positionnant comme défenseur de la santé, du climat et de la lutte contre la pauvreté, l’autre comme militante engagée pour les droits des femmes et l’égalité. À première vue, leurs engagements s’alignent étroitement avec les Objectifs de Développement Durable. Pourtant, derrière cette image engagée, plusieurs zones d’ombre apparaissent. La transparence limitée de leurs structures, les logiques économiques sous-jacentes et les liens avec certaines entreprises interrogent la sincérité et l’efficacité réelle de leurs actions. Le paradoxe est renforcé par l’empreinte carbone toujours significative de Microsoft et la difficulté à mesurer l’impact de Pivotal Ventures. Ces tensions révèlent la complexité de concilier puissance financière, volonté de bien faire et impératifs économiques, et invitent à observer de près l’évolution future de leurs actions.
Et les femmes milliardaires ?
Bien que plus discrètes, les femmes milliardaires, comme Melinda Gates, auraient aussi un rôle à jouer dans l’avenir de notre planète. Si on s’intéresse à Alice Walton, la femme la plus riche au monde, on découvre l’imbrication étrange d’engagements durables et d’actions futiles, de combats éthiques qui semblent ne jamais concerner l’origine de sa fortune. Et si les engagements d’Alice Walton dans les domaines sociaux et culturels sont indéniables, leur impact réel sur les enjeux sociaux et environnementaux soulève de sérieuses questions. Son soutien à des causes progressistes coexiste avec une fortune liée à un modèle économique largement critiqué pour ses effets sur les inégalités et la dégradation écologique.
L’héritière de la famille fondatrice de Walmart lutte en effet pour des causes sociales. Alice Walton s’est illustrée par ses engagements sociaux et culturels. En 2011, elle fonde un musée gratuit, le Crystal Bridges Museum of American Art, afin de rendre l’art accessible à tous, une initiative louable, mais qui soulève aussi des questions, surtout lorsque l’investissement dans l’art étant l’un des moyens les plus efficaces pour optimiser sa fortune et limiter sa fiscalité. Dans cette même lignée, elle lance également l’Alice L. Walton Foundation, dédiée à la promotion de l’art, de l’éducation et de la santé (Madame Figaro, 04.05.2025) .
Par ailleurs, elle milite activement pour une meilleure santé publique, en défendant notamment la médecine intégrative, et soutient des causes alignées avec plusieurs ODD, comme l’éducation de qualité, la bonne santé ou la réduction des inégalités. En 2021, la famille Walton lance un fonds d’un million de dollars pour soutenir les associations LGBTQ+ en Arkansas, en réaction directe à l’adoption du SAFE Act (The Daily Signal, 21.11.2022). Présentée comme un engagement en faveur de l’inclusion, cette initiative semble aussi répondre à des considérations économiques et d’image : dans leurs déclarations, les Walton soulignent avant tout les risques que ce type de loi fait peser sur l’attractivité de l’État pour les investisseurs, les touristes ou les talents (Special Projects Walton Family Foundation,16.06.2021). Un geste philanthropique donc, mais qui défend aussi les intérêts d’un territoire dont ils sont l’un des plus puissants acteurs.
Et c’est sans compter les nombreuses critiques qui subsistent encore à l’encontre de Walmart, l’entreprise fondée par sa famille et principale source de sa fortune. La chaîne de magasins est régulièrement accusée d’exercer une pression sur les petits commerces, d’entretenir des conditions de travail précaires et de pratiques salariales insuffisantes (Wikipédia, consulté en juin 2025), en contradiction avec les ODD sur le travail décent et les inégalités. Sur le plan environnemental, l’entreprise est aussi pointée du doigt : ses chaînes logistiques mondiales produisent chaque année près de 300 millions de tonnes de CO₂, faisant d’elle l’un des plus gros pollueurs du secteur (Greendigest, 13.12.2024).
Les engagements d’Alice Walton dans les domaines sociaux et culturels sont indéniables. Toutefois, leur impact réel sur les enjeux sociaux et environnementaux, ainsi que les motivations qui les sous-tendent, soulèvent de sérieuses questions. Son soutien à des causes progressistes coexiste avec une fortune liée à un modèle économique largement critiqué pour ses effets sur les inégalités et la dégradation écologique. Si ces initiatives sont nécessaires pour un monde plus juste et durable, il reste difficile d’ignorer la contradiction profonde entre ces engagements et les origines mêmes de sa richesse.
Deuxième, mais pas moins volontaire
La deuxième femme la plus riche au monde, récemment détrônée, est souvent présentée comme une grande philanthrope. Françoise Bettencourt, héritière de Liliane Bettencourt, l’ancienne actionnaire principale de L’Oréal, a siégé dans plusieurs comités de l’entreprise avant de se retirer des affaires début 2025. Durant ses années d’implication, elle aurait activement soutenu l’orientation de L’Oréal vers un modèle plus durable et responsable (Finances Indépendantes,03.04.2024) .
En 2020, année où Françoise Bettencourt devient vice-présidente, L’Oréal fixe des objectifs ambitieux pour 2025 et 2030 : réduire de moitié ses émissions de CO₂, alimenter toutes ses usines à 100 % avec des énergies renouvelables, et n’utiliser que des matières recyclées pour ses emballages. Cependant, en 2025, ces engagements semblent encore loin d’être tenus. Selon le rapport annuel de l’entreprise, 97 % de ses sites sont alimentés en énergies renouvelables, un chiffre flatteur, mais qui n’inclut pas les systèmes de sécurité. De plus, seuls 47 % des emballages sont recyclables, rechargeables ou compostables. Ces résultats mettent en doute la capacité de L’Oréal à atteindre ses objectifs pour 2025, et posent des questions sur la sincérité de son engagement environnemental ainsi que sur la crédibilité de ses promesses pour 2030 (L’Oréal Finances & L’Oréal Paris, consulté en juin 2025).
L’Oréal s’investit également dans le programme Solidarity Sourcing, qui vise à favoriser l’insertion de populations en difficulté dans sa chaîne d’approvisionnement, et promeut l’émancipation des femmes et leur place dans la société. Ces engagements sociaux sont indéniablement positifs. Néanmoins, les résultats concrets de ces programmes sont peu médiatisés, ce qui rend difficile l’évaluation de leur véritable impact à long terme. Finalement, en 2020, L’Oréal lance le programme Stand Up, en partenariat avec l’ONG Right To Be, pour lutter contre le harcèlement de rue. Si l’initiative repose sur de bonnes intentions, son efficacité reste difficile à évaluer, faute de données mesurables disponibles. Et il est clair que cela sert de vitrine pour l’Oréal, malgré les bonnes intentions de l’initiative (L’Oréal Paris, consulté en juin 2025).
En dehors de son rôle chez L’Oréal, Françoise Bettencourt soutient la recherche universitaire et scientifique, en particulier dans le domaine des sciences du vivant, principalement à travers la Fondation Bettencourt Schueller. Un choix probablement stratégique, puisque la biologie joue un rôle central dans l’innovation cosmétique, fondement de sa richesse. La fondation Bettencourt Schueller, à laquelle elle contribue régulièrement, agit dans trois grands domaines : les sciences de la vie, les arts, et la solidarité, notamment avec le programme L’Oréal–UNESCO qui agit pour les Femmes et la Science et promeut les carrières scientifiques féminines (L’Insoumission,10.11.2022) .
Françoise Bettencourt apparaît comme une figure engagée en faveur du développement durable, notamment grâce à son rôle dans les objectifs environnementaux de L’Oréal et son soutien à la recherche scientifique. Pourtant, les résultats restent encore insuffisants, et les cosmétiques souvent polluants et porteurs de stéréotypes, montrent bien les limites de cet engagement. Ce paradoxe illustre à quel point il est difficile de concilier réussite économique, responsabilité sociale et enjeux écologiques, et soulève des questions sur l’impact réel de ces actions face aux défis d’aujourd’hui pour le développement durable.
Un bilan contrasté entre promesses et réalités
En regardant de plus près, on voit bien que le rôle des milliardaires dans les enjeux sociaux et environnementaux est loin d’être simple. Elon Musk, par exemple, pousse la transition écologique avec Tesla, mais ses choix, comme ses lancements spatiaux, montrent qu’il y a des contradictions fortes dans son engagement. Mark Zuckerberg, quant à lui, mise sur les énergies renouvelables pour ses infrastructures mais leur utilisation continue de produire énormément de pollution… Et son refus de modérer certains contenus soulève des questions quant à son intérêt pour les inégalités sociales. Bill Gates, avec sa philanthropie ambitieuse, agit sur la santé et la pauvreté dans le monde au profit des entreprises occidentales, remettant en cause ses réels intérêts derrière ses actions.
Du côté des femmes milliardaires, dont le rôle est important, bien qu’il soit si souvent invisibilisé, Alice Walton et Françoise Bettencourt s’engagent dans le social et la culture. Mais leurs initiatives peinent à contrebalancer les effets négatifs des modèles économiques qui ont fait leur fortune. Quant à Melinda Gates, très investie dans la cause des femmes, elle incarne un engagement plus militant, même si ses actions restent difficiles à mesurer pleinement, dues à un manque de transparence de sa part.
Au fond, ces milliardaires font face à un dilemme central : comment prétendre incarner le progrès social et écologique lorsque leurs entreprises continuent de générer des profits à partir de systèmes qui aggravent la pollution et les inégalités ? Cette contradiction affaiblit la crédibilité de leurs engagements, qui apparaissent souvent davantage comme des stratégies de communication que comme des leviers de transformation durable. Car promouvoir le développement durable tout en maintenant un mode de vie disproportionné revient à vouloir éteindre un feu tout en continuant d’y verser de l’huile. Derrière leurs initiatives philanthropiques se dissimulent parfois des motivations fiscales ou des intérêts économiques, difficilement compatibles avec l’idée d’altruisme désintéressé. Et malgré leurs dons spectaculaires, ces fortunes restent parmi les plus gros pollueurs de notre planète. Autrement dit, ils se présentent comme bienfaiteurs de l’humanité, mais sans toucher aux racines du problème : les machines à profit sur lesquelles repose leur richesse.
Sources
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Carole Bellemare (22.11.2019) Françoise Bettencourt Meyers prime les chercheurs d’exception des sciences de la vie Le Figaro https://www.lefigaro.fr/decideurs/portraits/francoise-bettencourt-meyers-prime-les-chercheurs-d-exception-des-sciences-de-la-vie-20191122
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Commission des Droits de l’Homme (08.04.1999) L’élimination de la pauvreté dans le monde couterait 80 milliards de dollars par an selon la rapporteuse spéciale sur l’extrême pauvreté Nation Unis Droits de l’Homme : Haut-commissariat https://www.ohchr.org/fr/press-releases/2009/10/default-title-172
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Fanny Pigeaud (07. 12. 2022) Fronde paysanne face à Bill Gates et la « révolution verte » Afrique XXI https://afriquexxi.info/Fronde-paysanne-face-a-Bill-Gates-et-la-revolution-verte
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Samuel Schlaefli (19.05.2023) Moins de 2.15 dollars par jour. La pauvreté se résume-t-elle à un chiffre? Coopération internationale Direction du Développement et de la Coopération DDC https://www.deza.eda.admin.ch/fr/moins-de-215-dollars-par-jour-la-pauvrete-se-resume-t-elle-a-un-chiffre
Sandrine Cheikh (10.11.2022) Portrait- Françoise Bettencourt, la femme la plus riche du monde L’Insoumission https://linsoumission.fr/2022/11/10/portrait-francoise-bettencourt/
Ségolène Forgar (04.05.2025) Qui est Alice Walton, la nouvelle femme la plus riche du monde ? Madame Figaro https://madame.lefigaro.fr/business/actu-business/alice-au-pays-des-milliards-le-discret-parcours-d-alice-walton-la-femme-la-plus-riche-du-monde-20250504
SudOuest (09.05.2025) « L’homme le plus riche du monde tuant les enfants les plus pauvres du monde » : Bill Gates dézingue Elon Musk » Sud Ouest https://www.sudouest.fr/international/etats-unis/elon-musk/l-homme-le-plus-riche-du-monde-tuant-les-enfants-les-plus-pauvres-du-monde-bill-gates-dezingue-elon-musk-24354327.php
Susanne Rudolf (22.01.2025) Un monde en déséquilibre : les inégalités à la loupe Plateforme Agend 2030 https://www.plateformeagenda2030.ch/un-monde-en-desequilibre-les-inegalites-a-la-loupe/
Thomas Wagner (05.03.2025) Elon Musk: Solution ou cauchemar pour l’environnement ? Bonpote https://bonpote.com/elon-musk-solution-ou-cauchemar-pour-lenvironnement/
Thomas Wagner (26.06.2023) Elon Musk est officiellement un ennemi pour la lutte climatique Bonpote https://bonpote.com/elon-musk-est-officiellement-un-ennemi-pour-la-lutte-climatique/
UNICEF (24.10.2024) Journée mondiale contre la poliomyélite: 85 pour cent des enfants touchés vivent dans des régions en crise UNICEF https://www.unicef.ch/fr/actualites/communiques-de-presse/2024-10-24/journee-mondiale-contre-la-poliomyelite-85-pour-cent
UNICEF (février 2021) Eau et hygiène UNICEF pour chaque enfant https://www.unicef.ch/fr/votre-aide/programmes/eau-et-hygiene
Victor Cousin (03.06.2025) « Je ne veux pas mourir riche » : Bill Gates va donner la majeure partie de sa fortune de 200 milliards de dollars à l’Afrique Le Parisien https://www.leparisien.fr/economie/je-ne-veux-pas-mourir-riche-bill-gates-va-donner-la-majeure-partie-de-sa-fortune-de-200-milliards-de-dollars-a-lafrique-03-06-2025-XGMGGZZSIRHBNIXTM5TF4YFR6E.php
Walton Family Foundation (16.06.2021) It’s Time to Focus on What Brings us Together, Not What Divides Us Special Projects Walton Family Foundation https://www.waltonfamilyfoundation.org/stories/home-region/its-time-to-focus-on-what-brings-us-together-not-what-divides-us
Wikipédia (consulté en juin 2025) Criticism of Walmart Wikipédia https://en.wikipedia.org/wiki/Criticism_of_Walmart
Wordsmith (consulté en juin 2025) Françoise Bettencourt Meyers fortune Etre-riche Wordsmith https://www.etre-riche.fr/francoise-bettencourt-meyers-fortune/
World Health Organization (10.04.2025) Statement of the forty-first meeting of the Polio IHR Emergency Committee World Health Organization https://www-who-int.translate.goog/news/item/10-04-2025-statement-of-the-forty-first-meeting-of-the-polio-ihr-emergency-committee?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=rq
Yves Raisiere (21.10.2020) Révolution agricole: « La Fondation Gates mène l’Afrique à l’échec » Tchak https://tchak.be/index.php/2020/10/21/revolution-agricole-la-fondation-bill-melinda-gates-mene-lafrique-a-lechec/